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Seleção

Train loupé, gare-hôtel et Ronaldo mania : mon voyage pour la Seleção

Mardi 18 juin, Paris. 

Il est environ 10 heures quand j’arrive à Gare de l’Est. Un train m’attend (vous verrez très bientôt que le terme « m’attend » n’est pas vraiment adéquat quand il s’agit de parler de train) pour me déposer à Karlsruhe. Là-bas, un second doit m’emmener à Frankfurt, puis un dernier à Leipzig. 

Ce long périple vers l’Allemagne, je le fais pour assister à l’entrée en lice de l’équipe du Portugal à l’Euro 2024. C’est la première fois depuis 2016, et un certain Croatie – Portugal, que je retrouve la Seleção. Cette fois-ci, elle affronte la Tchéquie.

Le départ est fixé pour 10h52. J’ai environ 40 minutes devant moi, j’en profite donc pour boire mon deuxième café de la journée et m’enfiler un croissant aux amandes. 

Et puis c’est l’heure. J’essuie les quelques miettes qui me restent sur le manteau et je pars. 

J’arrive à Karlsruhe à 13h30. Mon prochain train part dans une demi-heure, alors après le croissant aux amandes, j’avale cette fois-ci une petite pizza quatre fromages. J’ai un peu regretté d’avoir fait ce choix dans la précipitation parce que les box kebabs qu’ils vendaient me faisaient de l’œil. M’enfin, il était quand même pas mal ce fromton. 

J’ai à peine le temps de trouver des toilettes pour me laver les mains et me décharger d’un petit pipi, que je dois vite rejoindre mon train. 

De Karlsruhe à Frankfurt, il n’y a qu’une petite heure. Ce trajet va être rapide. Enfin, il aurait dû l’être. À 10 minutes de l’arrivée, le train est contraint de s’arrêter. Sauf qu’un troisième m’attend à Frankfurt ! Et cette fois-ci, la correspondance entre les deux n’est que de 10 minutes.

Alors j’arrive à Frankfurt, mais 10 minutes trop tard. Le train ne m’avait pas attendu…

Paniqué, je demande de l’aide dans un anglais approximatif. Les personnes à qui je m’adresse ne me comprennent pas vraiment et moi non plus. Ils finissent par me dire que le train pour Leipzig est censé arriver dans une heure. Bizarre. Je leur demande s’ils en sont sûrs ? Ils me répondent que oui. Alors va pour une heure. Le match commence à 21h, je devais arriver à 18h30, mais j’y serai finalement pour 19h30.

Finalement, j’avais raison : j’ai raté mon train, celui-ci en est un autre, qui passe aussi par Leipzig. J’ai donc voyagé illégalement. Tant pis, le premier n’avait qu’à m’attendre.

Ce troisième trajet se passe très bien. Je suis assis à côté d’un allemand originaire d’Inde avec qui je sympathise. Il me demande d’où je viens, ce que je fais dans la vie… alors je lui présente As Quinas, on parle un peu football et on se rend rapidement compte que notre destination est la même. Il continue en me disant qu’il est pro-Messi mais qu’il souhaite voir le dernier Euro de Cristiano de ses propres yeux… c’est beau.

Arrivé à Leipzig, on file avec deux autres allemands en direction du stade. Il est à 30 minutes de la gare à pied, alors on prend le tramway. Il est bientôt 20 heures, je vois et j’entends les supporters portugais et tchèques dans les rues ; l’ambiance est bonne.

Arrivés aux alentours de la Red Bull Arena, vient le moment de nous séparer car nous ne sommes pas dans les mêmes tribunes. On se dit donc adieu d’une franche poignée de main pour rejoindre nos places respectives.

Je croise énormément de supporters de la Seleção. Certains chantent pour le Portugal, d’autres pour Cristiano Ronaldo. Et puis j’arrive enfin au stade, j’ai une belle place, les gens sont déjà nombreux et tout le monde est euphorique.

Les gardiens portugais entrent en premier sur la pelouse pour l’échauffement, sous de chaleureux applaudissements.

Cette fois-ci, un autre allemand, d’origine portugaise, vient à ma rencontre. Je sympathise aussi avec lui. Il me demande d’où je viens, je lui retourne la question et on parle un peu du match à venir… Puis arrive le moment de l’hymne national. Il était avec un ami, j’étais seul. Il l’a remarqué et m’invite à chanter avec eux, comme un seul homme. Ça me touche. Je le rejoins puis retentit A Portuguesa.

Le rencontre démarre dans la foulée. Je vois le GOAT, sa première tête un peu molle sur un centre de Rafael Leão, la pluie qui tombe, la tension qui commence à monter au fil des minutes et les buts qui ne viennent pas…

À la mi-temps, je suis frustré. Je connais ma sélection. Ce genre de match où la réussite ne nous sourit pas, ce n’est jamais bon signe… La partie reprend, l’équipe est plus en rythme, mais à l’heure de jeu, elle encaisse l’ouverture du score. Je ne suis plus seulement frustré, mais abattu. Ça devait tomber sur nous… 

Et puis Vitinha, Nuno Mendes et Robin Hrànác me font mentir. Le Portugal égalise et pousse pour aller mettre le deuxième. Il arrive finalement par l’intermédiaire de Diogo Jota. Enfin, jusqu’à ce que l’arbitre finisse par l’annuler. Hors-jeu de CR7. 

Vient le moment des entrées de Pedro Neto et Francisco Conceição. Il était temps. Roberto Martinez n’avait plus fait le moindre changement depuis 30 minutes. Le timing aurait pu être différent, mais le but de la victoire arrive bien des deux. Je suis heureux et abasourdi. Car depuis que je suis activement la Seleção, rares sont les fois où elle est parvenue à se dépêtrer de ce genre de sales situations. Mais tant mieux, bien évidement

Il est 23 heures environ quand je quitte le stade. Les chants à l’effigie de Ronaldo reprennent de plus belle et les « Suiiii » aussi. Ce premier succès m’a donné faim. Je pense être le seul petit malin à avoir trouvé une fameuse chaîne de fast-food dans les environs. Problème : on est une cinquantaine dans mon cas. Alors j’oublie cette idée, et je rejoins la gare de Leipzig à pied. Là-bas, bon nombre de supporters portugais sont déjà en train de siester à même le sol. On est beaucoup à être venus en Allemagne pour regarder le match, sans prendre de chambre d’hôtel, pour repartir le lendemain matin, dès l’aube.

Une autre chaîne de fast-food présente dans la gare me fait de l’œil. La queue est énorme. Mais je me décide à la faire… même si mon dos me fait terriblement souffrir et ne demande qu’à se poser sur un lit douillet. Il attendra un peu. Comme moi qui ai attendu mes poulets pendant 40 minutes. Arrive enfin mon tour. J’ai à peine le temps d’entamer mes frites que l’on nous demande de quitter la salle. C’est l’heure de la fermeture… Alors je mange rapidement et je pars.

J’ai les mains grasses et pas de gel hydroalcoolique dans mon sac. Il faut donc que je me rende aux toilettes. Quelle ne fut ma surprise lorsque j’ai compris qu’il fallait payer pour pouvoir les utiliser, même pour un simple lavage de mains… À ce moment-là, je regrette presque de ne pas avoir eu envie de faire la grosse commission. Ces 1€ auraient été rentabilisés. 

La nuit passe. Tantôt je suis assis et allongé sur un banc, tantôt je fais les cents pas dans la gare qui s’est transformée, le temps d’une nuit, en un hôtel géant pour supporters.

Le lendemain à 6h48, il est déjà temps pour moi de faire le chemin inverse. J’en profite pour dormir dix minutes par-ci, dix minutes par-là. Finalement j’arrive chez moi aux alentours de 15h. À peine ma mère a-t-elle le temps de me saluer que je m’écroule de fatigue dans mon lit pour y rejoindre les bras de Morphée, à rêver de la percée de Pedro Neto et du but libérateur du fils Conceição…

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