Dans la nuit du 9 au 10 octobre 2021, Benfica a organisé de nouvelles élections afin de déterminer son nouveau président pour les quatre années à venir. Rui Costa a été plébiscité à 84% des voix. Il est temps pour l’ancien maestro de redorer le blason des Aigles, après les dernières années controversées de Luis Filipe Vieira à la présidence du club.
Pour mieux comprendre les enjeux de cette élection, il faut revenir en 2019. La saison est marquée par un échec sportif total au Benfica. Pour y remédier, Luis Filipe Vieira décide d’investir l’été suivant avec le mercato le plus dépensier de l’histoire du club, plus de 100 millions d’euros. Malgré tout, les supporters sont de plus en plus mécontents envers LFV.
Retour aux élections d’Octobre 2020 : Luis Filipe Vieira, de plus en plus contesté, une opposition se crée
À l’origine de ce mécontentement : les résultats sportifs, bien évidemment, mais aussi le timing de ces investissements qui coïncident avec les élections présidentielles d’octobre 2020. Les affiches contestataires commencent à se faire de plus en plus nombreuses autour de l’Estádio da Luz, avec des messages contre Luis Filipe Vieira : « Vieira, dehors » ou encore « plein de millions seulement en année d’élections ! »
Progressivement, une opposition se forme et un homme se détache parmi les candidats, João Noronha Lopes. Il s’agît d’un homme d’affaires très attaché au club qui a déjà exercé des fonctions de dirigeant dans l’histoire du Benfica. Il a notamment été le vice-président économique de Manuel Vilarinho, en 2002. Lors de ses diverses conférences, les supporters lui témoignent du soutien par la voix et le nombre. Parmi ses idées, l’ancien avocat tend à restructurer le club à la racine et veut changer la durée des mandats présidentiels, entre autres. Enfin, le candidat a des partisans de hauts calibres, des légendes de Benfica comme Antonio Simões et Vítor Paneira.
Lors de ses prises de paroles, il attaque publiquement la politique de Luis Filipe Vieira : « Benfica a besoin d’un président à temps plein, et en ce moment, il n’en a pas (…) un président qui refuse de débattre avec les autres candidats, est un président d’un Benfica populaire ? » Des déclarations faites au micro de la chaîne RTP lors de sa campagne électorale.
Par ailleurs, une autre personnalité du football portugais va affirmer son opposition à Vieira (sans mentionner un soutien à Noronha) : le milieu de Manchester City, Bernardo Silva. Sur Twitter, l’ancien joueur du Benfica s’était exprimé concernant les élections de 2020 : « Les Benfiquistas ne méritent pas un club associé à de nombreux procès judiciaires et de corruption, salissant de manière irréversible le nom du Benfica. »
Le 29 octobre 2020, arrive le jour des élections. Ce sont les élections avec le plus de votes dans l’Histoire de Benfica (jusqu’à l’élection de Rui Costa hier), avec plus de 38 000 votes. Luis Filipe Vieira l’emporte avec 62% des voix, contre Noronha Lopes qui en a obtenu 38%.
Désastre sportif et révolte des supporters
Après sa sixième élection, la pandémie entre en jeu et pour des raisons de santé LFV s’absente des stades. Une absence qui accompagne des résultats sportifs toujours plus compliqués et qui provoque une colère noire chez certains supporters du club de la capitale. Une manifestation informelle s’organise, dans le respect des conditions sanitaires tout de même. Malgré le contexte les fidèles du Benfica se réunissent massivement en voiture pour klaxonner leur mécontentement.
« Les socios de Benfica m’ont élu pour être président, à l’heure de la défaite […] le responsable c’est moi. » Dans une interview à Benfica TV, Luis Filipe Vieira répond aux critiques. Alors que le Benfica fête ses 117 ans, LFV assume ses responsabilités et réagit aux récentes manifestations : « Deux tiers des Benfiquistas ont voté pour moi ! Ce qui est en train de se passer est inqualifiable ! »
Malgré les échecs répétés sur la scène nationale et continentale, il continue de défendre les objectifs sportifs de la saison que sont le championnat et la Coupe du Portugal. Selon lui, la formation reste un axe important du développement lisboète, mettant ainsi les lourds investissements des mercatos précédents de côté.
Rui Costa, souverain d’urgence
Coup de tonnerre. Le 7 juillet 2020, Luis Filipe Vieira est en état d’arrestation. Le président est accusé par la justice d’avoir détourné et blanchi de l’argent issus de certains transferts, les supporters, eux, l’accusent d’avoir lésé le club. Deux jours plus tard, Rui Costa le remplace.
D’emblée, l’ancien joueur emblématique du Benfica prend son rôle au sérieux et cherche à apaiser cette situation chaotique : « Je ne suis pas un prince héritier, si un jour je suis président, ce sera par la volonté des socios. Des élections seront organisées d’ici la fin de la saison, mais pour l’instant on a besoin de préparer le Benfica, que ce soit au football ou dans les autres sports, et apporter de la stabilité au club » déclare-t-il lors d’une interview à la chaîne TVI.
Pour préparer la saison, Rui Costa remplace le directeur sportif, Tiago Pinto, parti depuis novembre 2020, par Rui Pedro Braz. Ce remplacement donne lieu à un mercato agité, mais réfléchi, sans folies financières. La balance de ce mercato est de 24 millions d’euros, ce qui entre dans le budget de Benfica et permet au club d’engranger quelques bénéfices. Parmi les arrivées, le club compte sur des internationaux comme l’ancien milieu de Sporting, João Mario, qui débarque librement.
Concernant le mois d’août de Benfica, elle est synonyme d’une tranquillité retrouvée. Les résultats sportifs sont enfin positifs : qualification en Champions League, première place en championnat. La situation est enfin apaisée, Rui Costa annonce que des élections sont organisées.
Néanmoins une opposition persiste. Elle va être menée une nouvelle fois par l’ex-candidat des élections de 2020, João Noronha Lopes : « Ce n’est pas que l’acte électoral soit trop tôt, c’est qu’il est fait à la va-vite, sans connaissance des règles et du déroulement. Ceux qui font partie du passé ne peuvent pas devenir une solution pour le futur (en référence à Rui Costa). » Contre toute attente, il annonce qu’il ne se représentera finalement pas aux élections pour des raisons familiales.
Un autre homme est alors ressorti comme principale opposition, en la personne de Francisco Benítez, leader du mouvement « Servir o Benfica. » Créé par des socios de Benfica, ce mouvement a pu récupérer assez de signatures pour imposer une assemblée générale au club. Lors de la dernière semaine avant les élections, Benítez et Rui Costa ont l’occasion de présenter leur programme, de défendre leurs idées sur Benfica TV, la chaine officielle du club Encarnado. Sans grande surprise, c’est finalement l’ancien milieu de terrain du Benfica, qui s’est aisément imposé ce 9 octobre, avec 84% des votes. Ce dernier compte bien reconduire Benfica aux sommets du pays, et pourquoi pas, pouvoir scruter le toit de l’Europe.